Mourir à Irigny entre 1780 et 1790 |
G.Courbet : "l'enterrement à Ornans" (Musée d'Orsay)
Entre 1780 et 1790, 398 personnes ont été inhumées à Irigny. Hommes, femmes, mais aussi nombreux enfants, la mort frappe souvent, et souvent tôt, en cette fin de XVIIIeme siècle - au point qu'elle fait partie de la vie du village et que les parents doivent se résoudre à l'idée de pouvoir perdre un ou plusieurs de leurs enfants lorsqu'une épidémie se déclare, que les récoltes sont mauvaises ou simplement que le hasard l'a décidé. |
évolution du nombre de décès annuel entre 1780 et 1790 |
solde annuel [décès - naissances] entre 1780 et 1790 |
C'est entre 30 et 40 Irignois qui décèdent chaque année, mais on note un pic à 61 en 1788 : cette année-là, le printemps a été très froid, les récoltes compromises et certains villageois sont touchés par la famine. A Lyon, la misère s'étend et touche la Fabrique; les tissus luxueux ne se vendent plus. Les Irignois qui vivent de cet artisanat sont touchés et voient leurs revenus diminuer.
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Causes des décès |
Les causes de décès, à cette époque et dans ce milieu rural, sont étroitement liées à la saison et aux variations de l'activité agricole ; on note également des variations en fonction de l'âge de la personne et de son sexe. Globalement, les principales causes de mortalité "précoce" (ne tenant pas compte des décès "naturels") en cette fin de XVIIIeme siècle sont
-les maladies et épidémies
Les famines sont aussi peut-être en cause, notamment en cette année 1788 où le pic du nombre d'inhumations à Irigny coïncide avec des conditions socio-économiques difficiles au niveau local.
-les décès "en couches"
Ces décès touchent nécessairement des femmes plutôt jeunes (puisqu'en âge de procréer), et laissent donc souvent des veufs avec de jeunes enfants - ou même un nouveau-né quand il a survécu à l'accouchement. C'est le cas d'Elizabeth CHAZETTE, qui meurt en couches à 30 ans, en mai 1780, après avoir eu au moins 8 enfants. Le père Ennemond PUPIER reste avec au moins 6 enfants à élever dont la petite Claudine, née le jour du décès de sa mère.
-les accidents
-les noyades
Il faut garder à l'esprit que dans la quasi-totalité des cas, la cause du décès n'est pas précisée sur l'acte d'inhumation : ce sont l'âge et le sexe du défunt, ainsi que d'éventuelles autres sources, qui permettent de supposer la cause du décès - sachant que l'erreur est toujours possible en ce domaine. |
Mois du décès |
Le graphique de fréquence des décès selon le mois de l'année montre a priori un pic en août-septembre, et un creux en mai-juin. Il est toutefois difficile d'interpréter correctement un tel schéma qui englobe la totalité de la population irignoise et ne tient pas compte de son hétérogénéité - hommes, femmes, enfants, vieillards. On peut juste y trouver la confirmation du fait que c'est au printemps que l'on meurt le moins, saison pendant laquelle les travaux agricoles laissent un peu de répit aux travailleurs et le climat relativement tempéré n'agresse pas les personnes fragiles (enfants, personnes âgées).
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Longévité |
Entre 1780 et 1790, 22 vieillards âgés de plus de 80 ans ont été inhumés, ce qui représente environ 5 %
des décès. On ne constate pas d'influence du sexe, puisqu'il s'agit de 11 hommes et de 11 femmes. Un seul a dépassé 90 ans : Antoine SAVIGNY est inhumé le 8 août 1780, à l'âge de 92 ans.
Certains décès d'octogénaires sont cependant à considérer "à part" : il s'agit fréquemment de rentiers, "Bourgeois de Lyon", ou encore veuves, s'étant retirés à Irigny, où ils possédaient des résidences secondaires, pour y terminer leurs jours. Il est possible que les conditions de vie de cette population particulière expliquent leur longévité. |
Mortalité infantile |
Les registres paroissiaux montrent que les décès d'enfants de moins de 10 ans représentent, en moyenne, plus de 40 % de la totalité des inhumations. En 1788, on observe même un pic à 52 %, avec 32 décès d'enfants sur un total de 61.
Cas particulier : les enfants en nourrice La proximité de Lyon, mais aussi les usages de l'époque, amènent beaucoup de petits Lyonnais à passer leurs premiers mois, ou leurs premières années, en nourrice dans les campagnes environnantes : c'est ainsi qu'Irigny en accueille un bon nombre, semble-t-il, si l'on en croit les registres paroissiaux qui font état de leurs décès ... puisque malheureusement c'est souvent la mort en bas âge qui attend ces jeunes enfants. Bien souvent, d'ailleurs, ils seront inhumés sans même la présence de leurs parents.
L'acte précise le plus souvent la profession du père de l'enfant : en l'occurence, fabricant en soye, apothicaire, pâtissier ou cordonnier à Lyon, veloutier (fabricant de velours) ou encore simplement Bourgeois de Lyon...
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